Les écrivains dans le département de l’Ain
Sur les pas des écrivains dans le département de l’Ain
Roger Vailland et Bernard Clavel dans le Revermont, Stendhal, Edgar Quinet et Nizan à Bourg-en-Bresse, Saint-Exupéry et Tardieu dans le Bugey, Voltaire à Fernay dans le pays de Gex, On dirait que le département de l’Ain exerce une certaine attraction sur les écrivains. En voici quelques-uns qui y sont enracinés ou qui y ont passé quelques années. Choix très subjectif car auraient pu très bien y figurer les écrivains bressans Edgar Quinet et Gabriel Vicaire, l’auteur des "Émaux bressans", ou les deux écrivains du Revermont, Roger Vailland et Bernard Clavel auxquels j’ai déjà consacré des fiches spécifiques.
(voir la rubrique "Autres fiches à consulter")
1- L’église de Brou
Voir aussi ma fiche sur L'église de Brou Gisant de Philibert II de Savoie
Cette église, joyau du gothique flamboyant, élevée à la mort du duc Philibert le Beau par Marguerite d’Autriche, sa veuve inconsolable, a suscité bien des commentaires. Stendhal, de passage à Bourg-en-Bresse, dans son livre "Voyage en France", ne goûte guère ses sculptures baroques au moment où « la lumière de la Renaissance brillait déjà en Italie ». De même, l’écrivain américain Henri James dans ses souvenirs de voyage, s’étonne qu’elle soit si éloignée du cœur de ville.
Quant à Edgar Quinet l’enfant du pays, il déplore dans "L’église de Brou, esquisse poétique" le manque d’entretien de l’édifice. Mais Alexandre Dumas, qui visite Brou et la chartreuse de Seillon à l’écart de la ville pour les besoins de son roman "Les compagnons de Jéhu", aura ce commentaire : « Ceux qui ont vu la charmante petite chapelle de Brou savent que c’est une des cent merveilles de la Renaissance. »
2- Une figure tutélaire : Voltaire à Fernay
Son château sa statue à Ferney dans l'Ain
Le domaine que Voltaire acquière en 1759 a une vertu incomparable : une allée de peupliers au bout de la terrasse conduit directement en Suisse. Situation vitale pour l’écrivain en délicatesse avec le pouvoir royal. Il s’engage aussi dans la vie du village : fait rebâtir l’église –lui l’athée impénitent- entretient l’école, ouvre un théâtre et fait agrandir son château. Il met en pratique les idées développées dans son ouvrage "Dialogue pour les embellissements du Cachemire", surtout dans l'amélioration de l’hygiène, crée une maison des artisans et finance l’édification de fontaines. Il écrira en 1772 : « Je m’y suis ruiné mais ne suis pas découragé. J’aurai toujours dans mon village le glorieux titre de fondateur. »
3- L’enfance d’un aviateur
La maison de son enfance dans le Bugey (01)
Dans "Terre des hommes", Antoine de Saint-Exupéry perdu dans l’étendue du Rio de Oro dans le Sahara, évoque sa prime jeunesse dans la propriété de Saint-Maurice-de- Rémens dans l’Ain, près d’Ambérieu-en-Bugey. « Je suis de mon enfance comme l’on est d’un pays » écrit-il. Il se souvient des baignades dans la rivière d’Ain toute proche, des balades à vélo, l’entretien du potager, les jeux dans le parc avec ses cinq frères et sœurs sous l’œil vigilant de Paula leur gouvernante allemande.
Dans le désert, il n’a guère que ses souvenirs pour le soutenir : "Il était quelque part un parc chargé de sapins noirs et de tilleuls et une vieille maison que j’aimais." Son esprit vagabonde dans ses souvenirs quand il continue : "Je n’étais plus ce corps échoué sur une grève… j’étais l’enfant de cette maison, plein du souvenir de ses odeurs, plein de la fraîcheur de ses vestibules, plein des voix qui l’avaient animée."
Le domaine de Saint-Maurice-de-Rémens, repris récemment par la commune, est destiné à devenir un musée, celui du futur aviateur et écrivain. (voir ma fiche La maison de Petit Prince à St-Maurice-de-Rémens dans l'Ain)
4- Un philosophe en Bresse
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Nizan à Bourg en 1931 Nizan avec Rirette
C’est en 1932 que Paul Nizan fut nommé professeur de philosophie au lycée de Bourg-en-Bresse. La ville est pour lui un univers inconnu qu’il découvre avec curiosité, la trouvant plutôt froide et indifférente. Mais il est conquis par le grand marché qui draine vers le centre ville sur la grande esplanade qu’on nomme ‘Le champ de foire’, nombre de bressans. Il y trouve « un foisonnement de pas plus lourds et plus marqués que les pas des citadins. »
C’est pendant son séjour à Bourg-en-Bresse que Paul Nizan publie "Les chiens de garde", dépassement de l’enseignement de ses maîtres, et surtout "Léon Bloyé", son roman le plus connu, l’histoire d’un homme confronté à la rupture avec ses origines sociales.
5- Les eaux souterraines de Tardieu
Jean Tardieu à Meillonnas en 1991
Jean Tardieu a été marqué dans son enfance dans le Bugey par ce qu’il appelait « les fleuves cachés. » Là-bas, les cours d’eau comme le Rhône ou la Valserine s’enfoncent brusquement dans le sol pour ressortir en aval plusieurs kilomètres plus loin. « Le Rhône… cheval fantôme, disparaissaient sous les pierres tombales de son lit… et la Valserine, Perséphone fidèle, continue à descendre aux enfers, pour renaître écumante. »
Son attachement à l’Ain s’exprime dès 1933 dans son livre de souvenirs "Mon pays des fleuves cachés" où il replonge dans sa jeunesse : « Simandre-sur-Suran ! Lalleyriat ! criait l’employé du train, entre Nantua et Bellegarde… D’autres noms de mon pays me reviennent, avec leur sonorité acide, qui rafraîchit la mémoire…' » On retrouve dans son œuvre sa fascination pour les "fleuves cachés", sa prédilection pour la dualité apparition-disparition ou le thème de l’obscur, « pour moi, l’aspect des choses, écrira-t-il, plonge et se joue entre la présence et l’absence. »
6- Autres fiches à consulter
- Quelques écrivains dans "Rhône-Alpes" :
Maurice Scève et Louise Labé ---- Roger Vailland ---- Bernard Clavel - Saint-Exupéry à Lyon, Paris...
- Jean Tardieu